Deux directives du 26 février 2014 n° 2014/24/UE relative à la passation des marchés publics (dite secteurs classiques) et n° 2014/25/UE relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (dite secteurs spéciaux) ont été publiées au JOUE du 28 mars 2014[1]. La transposition de ces directives devant intervenir avant le 18 avril 2016, l’article 42 de la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014[2] relative à la simplification de la vie des entreprises a autorisé le Gouvernement a procédé à cette transposition par voie d’ordonnance.
L’ordonnance relative aux marchés publics vient d’être publiée au JO le 24 juillet 2015.

I.   Une clarification du champ d’application du code des marchés public
Plusieurs nouveautés existent dans l\’ordonnance mais deux sont principalement à relever.
D’une part, l’ordonnance met fin à la distinction entre les procédures de mise en concurrence relevant du code des marchés publics et celles relevant de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005[1], d’autre part, sont précisées  les règles applicables à la coopération public-public.

L’unification des règles applicables aux marchés publics au sens des directives européennes
Cette ordonnance a pour effet direct et immédiat de rassembler, au niveau législatif et en un seul texte l’ensemble des règles applicables aux marchés publics au sens des directives européennes.
La distinction entre les acheteurs soumis au code des marchés publics et les acheteurs soumis à l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 (dont certaines associations) n’existera plus puisque l’ensemble des pouvoirs adjudicateurs et des entités adjudicatrices relevant jusqu’à présent de ces deux textes distincts relèveront désormais du seul nouveau code des marchés publics. Le champ d’application est donc unifié sans pour autant que de nouvelles entités ne soient soumises aux règles de mise en concurrence.

Des relations de coopération public-public précisées
L’ordonnance prévoit plusieurs exclusions, relatives aux relations internes au secteur public qui deviennent codifiées alors qu’elles n’étaient jusqu’alors que jurisprudentielles.
A cet égard, on peut relever deux points qui concernent les relations de quasi-régie et la coopération entre les pouvoirs adjudicateurs.

Les relations de quasi-régie. L’ordonnance étend enfin l’exception in house[2] aux organismes financés par des capitaux mixtes dès lors que les capitaux privés sont sans capacité de contrôle ou de blocage. Est également envisagée l’hypothèse d’un in house de second rang, le contrôle pouvant être exercé par une autre personne morale, elle-même contrôlée de la même manière par le pouvoir adjudicateur.
Enfin, l’ordonnance répond aux hypothèses de in house « renversé » ou « horizontal », dispensant de mise en concurrence les marchés attribués par l’organisme contrôlé au pouvoir adjudicateur qui le contrôle ou à d’autres personnes morales contrôlées par le même pouvoir adjudicateur.

Les relations de coopération entre pouvoir adjudicateurs. L’’ordonnance prévoit d’exclure de son champ d’application les marchés publics par lesquels les pouvoirs adjudicateurs mettent en place une coopération dans le but de garantir que les services publics dont ils ont la responsabilité sont réalisés en vue d’atteindre les objectifs qu\’ils ont en commun.
 
 
II.   Une volonté de simplification
L’ordonnance précise la définition et l’objet de deux types de contrats, les marchés globaux et les contrats de partenariat.

–   L’harmonisation des marchés globaux
L’ordonnance décline les marchés publics globaux en trois contrats distincts :

  • les marchés publics de conception-réalisation, copie quasi-conforme de l’article 37 du code des marchés publics, qui permettent  à l’acheteur de confier à un opérateur économique une mission portant à la fois sur l’établissement des études et l’exécution de travaux, si un engagement contractuel sur un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique ou des motifs d’ordre technique rendent nécessaire l’association de l’entrepreneur aux études de l’ouvrage ;
  • les marchés publics globaux de performance, synthèse très succincte des dispositions de l’actuel article 73 du code des marchés publics, associent l’exploitation ou la maintenance à la réalisation ou à la conception-réalisation de prestations afin de remplir des objectifs chiffrés de performance définis notamment en termes de niveau d\’activité, de qualité de service, d’efficacité énergétique ou d’incidence écologique.
  • les marchés publics globaux sectoriels applicables notamment aux immeubles de la police nationale, de la gendarmerie, de la défense, du secteur pénitentiaires, hospitaliers, etc.

En assouplissant les conditions de recours à ces contrats globaux, le Gouvernement entend également les rendre plus attractifs et encourager les acheteurs publics à y recourir même s’ils constituent une dérogation importante à la loi MOP[3].

–   Les nouveaux marchés de partenariat
Toujours dans une perspective de simplification du droit de la commande publique, l’ordonnance fait évoluer le contrat de partenariat en « marché de partenariat » dans lequel devraient venir s’intégrer l’ensemble des partenariats publics-privés, y compris les baux emphytéotiques administratifs.
S’inspirant dans une large mesure du contrat de partenariat, le marché de partenariat est un contrat global à la maîtrise d’ouvrage privée avec paiement différé. Toutefois, à la différence de son prédécesseur, le recours au marché de partenariat sera soumis à un critère unique, celui du bilan favorable[4], l’urgence et la complexité pouvant être pris en compte à travers ce bilan.

Pour conclure, les procédures de passation ne sont pas bouleversées par le texte qui reprend les distinctions classiques entre les procédures formalisées et les procédures adaptées, l’ordonnance habilitant le pouvoir réglementaire à déterminer les procédures applicables et à préciser les mesures d’application nécessaires. Si l’ordonnance se veut synthétique et traduit une volonté de simplification des textes applicables, il conviendra d’être vigilant quant à la rédaction des décrets d’applications qui pourraient réintroduire des difficultés nouvelles pour les acheteurs publics.
 
 

Anne-Cécile Vivien, avocat associé, Ernst & Young 
 
 
 
 
En savoir plus :

 
Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics
 

Publication le 24 juillet 2015 de l’ordonnance portant simplification présentée par Patrick KANNER en Conseil des Ministres le 22 juillet . Notamment l’art. 4 apporte un complément à l’article 10 de la loi du 12 avril 2000 précisant que les demandes de subventions auprès d’une autorité administrative doivent être établies selon un formulaire unique dont les caractéristiques sont précisées par décret.
 
 





Notes:

[1] LJF janvier 2014, « Nouvelles règles européennes en matière de marchés publics et de concessions : quels impacts en droit interne ? », Jacky Galvez

[2] Loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives

[3] Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics
[4] Un pouvoir adjudicateur est dispensé d’engager une procédure de passation d’un marché public lorsqu’il exerce sur l’entité attributaire un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services et que cette entité réalise l’essentiel de son activité avec le ou les pouvoirs adjudicateurs qui la détiennent (CJCE, 18 novembre 1999, Teckal, aff. C 107/98).
[5] La loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée
[6] Le contenu de ce critère du bilan favorable sera défini par décret

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